Ces temps-ci je me sens comme ça. Rien à voir avec le titre. C'est l'image. Qui m'a fait penser au titre. Qui m'a fait penser à l'image. Et à l'histoire. Puis à l'image. Anyway.
Je ne vous ai pas raconté ça hein. Mais je devrais. Ça me ferait du bien de m’en rappeler. Surtout en ce moment.
Au Salon du livre. Dimanche après-midi. À cinq minutes de mon heure. Je suis tombée sur ma sœur équipée de son kodak, moi j’arrivais tout juste de saigner du nez dans les toilettes du 1000 De la Gauchetière. Le temps de lui dire que je préférerais être dans le fond des bois, quelque part entre Grand-Remous et Mistassini, on est venu me dire que quelqu’un m’attendait déjà à ma table. J’ai jeté un coup d’œil furtif.
Nan, ce n’était pas ma grand-mère.
Je ne le connaissais pas. J’ai ramassé mon courage, je me suis mouchée une énième fois, et je me suis dirigée vers ma table. J’ai enlevé mon manteau, déposé mon sac sur une chaise, et j’ai tendu la main.
— Salut!
— Salut!
J’étais mal à l’aise comme la Mort, en supposant que la Mort possède des sentiments malgré ce qu’on peut en penser, qu’en sais-je anyway, hein, et j’ai tenté le faciès de la fille-relaxe-malgré-l’angoisse-le bruit-l’éclairage des néons-les comprimés de machin antitussif-et-autres-nombreux-anxiogènes.
Il se présente, un exemplaire de mes corpuscules entre ses mains, et me raconte pourquoi il est là.
— Je sors de thérapie. Je suis un alcoolique. Ton livre m’a touché. J’ai pas envie de finir comme Korsakoff.
Vlan.
Y’avait beaucoup de monde qui déambulait autour de nous, beaucoup de bruit. J’avais une bouteille d’eau pas loin, des pastilles Halls au cas où je m’étoufferais (les noires, les plus fortes), des cadavres de mouchoirs dans une poche, ensanglantés pour la plupart, et un Bic Ultra Round Stic Grip à quelque part dans le fond de mon sac. Mon champ de vision de 180 degrés s’est rétréci pas mal vite. À ma gauche je voyais le pot de fleurs jaune-orange qu’on avait placé à ma table, et à droite, du monde flou. Pas mal flou. Entre les deux, je le voyais lui qui me parlait du syndrome de Korsakoff qu’il avait l'air de bien connaître, et de mon livre qui l’avait aidé à passer au travers.
Je ne me souviens plus de ce qui est sorti de ma bouche parce que ça a jailli direct du cœur.
Quand j’ai enfin mis la main sur mon stylo à quelque part au fond de mon sac, d'une main ébranlée, je lui ai dédicacé un truc sans fin.
On a jasé un bon dix minutes.
Assez pour que mon envie de fond des bois disparaisse.
Je l’ai remercié, il est parti.
Et je le remercie encore.
13 commentaires:
Touchant. Un droit au coeur en commençant, tu méritais ça. Une Sandra Gordon méritait ça, pour sûr !
Sachant que tu n'es pas très friande de l'ambiance un peu carnaval d'un Salon, j'ai pensé à toi, vraiment pensé à toi. Car il y a une manière de rester en surface du Salon, quant on y entre pas vraiment. Mais ce lecteur t'y a fait entrer. Et par la grande porte !
J'aurais donc aimé aller te piquer une jasette mais, tu n'étais pas en dédicace la seule journée où on l'était, le samedi. Coline de bine !
À un autre Salon alors !
Pour toutes les raisons,
si un livre aide ne serait-ce
qu'une seule personne,il est
nécessaire.
Ça rejoint une phrase entendue
dans le film "L'armée Silencieuse":
"Si tu sauves une personne,
tu sauves l'humanité".
touchant... je m'imagine le gars d'ici, il a l'air beau, timide, sincère ; un peu comme ton billet...
merci.
Fred
Magnifique. Point.
Sont comme ça des fois les alcooliques. C'est fou comme la littérature peut être le détonateur d'un réveil spirituel... parce que le rétablissement passe souvent par cette prise de conscience.
Dans ma bibliothèque devrais-je placer les Corpuscules sur la même tablette que mes revues La vigne, entre les Réflexions de Bill et le Gros livre ?
Bon 24 heures euh... bonne journée. :-)
Shit !
Pendant que je me mettais de l'acrylique rouge sous le nez, toi tu pondais ceci. Check ma photo sur le thème de Jarmusch.
Code : nestu (pas biz)
Touchant, ce l'était. J'ai pensé à vous deux aussi, Venise. Tu passeras le bonjour à Marsi, okay?
Yvan, je pense surtout que le gars s'est sauvé par lui-même. Mais il m'a offert un moment en or et pour ça, je le salue.
Merci Fred. Juste merci, tsé.
Pieds, idem. Sincèrement.
Gaétan, place-les où tu veux (rires). Tout sauf le bac bleu, et j'en serai ravie. Bon 24 heures, cher!
Je savais ta chevelure carmin Miss D, mais de là à te voir pisser le nez d'un rouge sang... Ouain. Bon timing en effet.
Oui, c'est une belle tranche de vie, et puis comme tu le racontes, c'est poignant, ça a dû te faire chaud au coeur etde donner envie d'écrire encore, n'est-ce-pas!
C'est vraiment une belle histoire, et c'est vraiment chouette que cet homme là soit venu jusqu'à toi te le dire en personne, c'est que vraiment ton livre, tes mots ont compté pour lui.
Rien que pour celui-là ça valait toutes heures passées à sortir ce jus de toi, hein!
Bises, ma belle.
Blue
Ouais, c'était ben spécial.
Bises à toi aussi, Blue. Et bises à chacun d'entre vous. Je peux me le permettre, mes micro-organismes infectieux sont morts et enterrés.
Fuck le vaccin anti-grippal saisonnier!
(rires)
Si je comprends bien,lorsque l'on finit par coucher tous les personnages de son livre, on risque d'en réveiller toute "in aut gang" parmi ses lecteurs.
Une chance que c'te dimanche on s'est raté; Ti-cul pis l'Matou voulaient t'aborder en sourds-muets juste pour voir ta réaction et ton habilité en langage signé!
Aaah. Je leur aurais langage-signé une couple de mimiques avec plaisir, MmwH. Tout ce qui ne se dit doit bien se communiquer!
On remet ça. Encore.
;)
sandra une bien jolie histoire le livre est réparateur ... bien des fois il sauve de la solitude...le tien j'aimerais bien le lire...Il ya une librairie canadienne que je connais vres le Luxembourg je vais aller voir...
Merci pour ton commentaire, Laurence.
:)
Enregistrer un commentaire