Cadeau! Et bonne année!
L'affaire Bronswik (Leduc et Awad, 1978)
de sandra gordon
On ne trouvera pas ça au Dollorama, encore moins à La Baie ou sur eBay. Ça fait pas loin de deux décennies que je ne les avais pas vus. Je vous présente Jill, Réjean et Steeve (avec deux E, une pose étrange et une face massacrée par un molosse mécontent), trois phénomènes pas ben ben jasants qui ont longtemps hanté le temps des fêtes de mon enfance. Les lumières multicolores et les débris de guirlandes avaient peut-être pour mission de leur conférer un air bon enfant, okay, idem pour le papier imitation brique, la mise en scène sympa avec les animaux qui réchauffent la cabane pas isolée, alouette, mais maudit que la face de Steeve ne me revenait pas. À quatre, cinq ans, on ne se dit pas : Tiens, un pastiche de Picasso ou Mince, il lui faudrait un chirurgien maxillo-facial. Non. On ne dit rien, on préfère se tenir loin. Garder une petite distance, tsé, au cas où le monstrueux gus en vert décidait de se déplier le genou et de se jeter sur toi en récitant à l'envers des versets de l'Apocalypse.
Pas folle, la fille.
Mais euh.
Cette année, ma soeur a hérité du kit au complet.
Je vais revoir Steeve dans exactement deux semaines.
Steeve, si tu m'entends, je voudrais te dire ceci, et vous me connaissez, c'est rare que j'utilise des majuscules :
TOI PIS MOI DANS LE SALON DE MA SOEUR, DRETTE EN FACE DU CONIFÈRE DÉCORÉ.
À MINUIT PILE, MAN. JE T'ATTENDS.
"Qu'est-ce que tu penses de la Lune?"
-Merde.
-Ouais, dit l'Indien, le mec qui est con sur la Terre il reste con sur la Lune. Pas de raison que ça change.
BUKOWSKI, Charles. Contes de la folie ordinaire.